2008-07-31

Le choix à tout prix

Il y a quelques temps, je vous parlais ici et ici des extrémistes religieux de mon quartier qui se prosternent à chaque semaine devant la clinique d’avortement du coin :

« Au moins deux fois par semaine et à longueur d’année, des militants pro-vie se prosternent et prient à genoux devant l’entrée [du Planned Parenthood en face de chez moi], arborant crucifix, images dénaturées de fœtus morts, pancartes de slogans contre l’avortement, cierges allumés et portraits de la Vierge Marie. Je vous dis, un spectacle fou ! En les regardant distribuer quantité folle de dépliants condamnant l’avortement et louangeant l’importance d’être pro-vie, on ne peut s’empêcher d’être totalement fasciné et subjugué par la chose. Regarder les ploucs en question se faire aller devant une bâtisse en priant Dieu au nom de la vie, c’est un peu comme voir débarquer les Martiens dans sa cours arrière. Littéralement. En 2008 ? Eh oui... »

Hé bien imaginez-vous que même ici, dans cette contrée libre du 21e siècle qui a oublié ce que c’était de manifester contre la guerre, y’a quand même parfois de l’espoir ! Il y a quelques semaines, face à ces démonstrations religieuses d’extrême droite qui n’en finissent plus, quelques jeunes étudiants du coin se sont mobilisés pour faire savoir qu’ils étaient en désaccord total avec ce genre d’opinion rétrograde.

Résultat ? Avec des pancartes préparées à la main, de la détermination à revendre, des slogans dans le genre « Protégeons la santé des femmes ! », « Oui à la contraception ! » ou « Klaxonnez si vous êtes pro-choix ! », les jeunes se sont spontanément mobilisés pour manifester devant le Planned Parenthood du quartier (qui se situe ironiquement devant la maison natale de George W. Bush) !

Cliché croqué sur le vif :


Et vous voulez savoir ce qui était le plus beau dans tout ça ? Ça klaxonnait tellement dans les environs qu’on cherchait où se trouvait le cortège des mariés !

2008-07-28

Une nation "d'autocolleux"

À peu près dans toutes les sphères de sa vie personnelle, l’Américain moyen affiche ses opinions de manière beaucoup plus drastique que le Québécois ou le Canadien moyen. Phénomène social s’il en est un, l’autocollant de pare-choc (en bon français, le bumper sticker) est ici d’une omniprésence si grande qu’on devient vite un danger public à tenter de les lire sur la route et dans les stationnements de centres d’achat !

À ce niveau, la différence culturelle entre nos deux pays est carrément flagrante : alors qu’on ne voit pratiquement jamais cela au Québec, je dirais sans exagérer qu’une voiture sur quatre dans mon petit coin du Connecticut est décorée d’un bumper sticker ou de toute autre forme d’appartenance bizarroïde. Voici quelques petites perles d’absurdités totales, de convictions tordues, d’extrémisme flagrant ou de détails anodins dénichés dans les dernières semaines sur les pare-chocs des voitures environnantes.

Les collants sautés :





Les collants de gauchistes :









Nos favoris à tous (sic) : les extrémistes de droite. Oui, oui, ce sont de vraies photos prises dans l'un des états les plus démocrates des États-Unis :







Et l’un des collants les plus drastiques, que je n’ai malheureusement pas pu prendre en photo puisque j’étais sur la route, mais que je vous offre néanmoins ici sous forme de macaron :


Bang !

2008-07-25

Une lettre au Dernier Québécois

Cher Belz,

Je ne m’en cacherai pas : lorsque j’ai lu vos insultes à mon égard il y a de cela quelques jours, j’ai bien failli vous lancer des bêtises par la tête uniquement dans le but de vous répondre impulsivement. Mais j’ai cru bon laisser retomber la poussière, ne serait-ce que pour faire triompher l’honnêteté du processus d’argumentation. Sur ce, bien que la démocratie dans laquelle nous vivons nous permette d’exprimer des opinions divergentes de manière parfois robuste, elle ne nous autorise toutefois pas à salir la réputation d’un individu sur la seule base de ses origines. Ça, on appelle ça du racisme et de la xénophobie. Point à la ligne.

À cet effet, rappelons-nous quelques-unes de vos paroles édifiantes à mon égard :

« J'ai mieux à faire que de défendre mes idées de diversité culturelle et de respect des cultures devant des gens bornés et colonisés comme vous. (...) L'auteur de ce blogue est un exilé québécois (du village de Québec) vivant aux États-Unis. Devant si peu de fierté et un tel à-plat-ventrisme, je crois qu'il n'y a rien à ajouter, sinon que je ne perdrai plus mon temps ici. (...) Quand on est colonisé au point de ne plus se rendre compte qu'on l'est, c'est généralement le point où il n'y a plus rien à ajouter. (...) Personnellement les gens qui se permettent de donner des leçons de français et de diversité culturelle au Québec mais qui sont partis vivre en anglais aux États-Unis me donnent envie de rire. »


Premièrement, commençons par le commencement : oui je suis né à Québec. C’est peut-être bien dommage pour vous, mais que voulez-vous que j’y fasse ? Que je m’en excuse ? Que je me repente ? Que je retourne dans le ventre de ma mère il y a très exactement trente ans aujourd’hui dans le but de la forcer à aller accoucher à Montréal ?

Ridicule.

Je suis né à Québec et j’y suis encore très attaché, car j’y ai grandi, j’y ai plein de bons souvenirs et plusieurs membres de ma famille y habitent encore. De plus, je suis fier de Québec, car c’est à mon avis l’une des plus belles villes qu’il m’ait été donné de visiter dans ma vie (et faites-moi confiance, j’en ai vu beaucoup). Je vous le demande sincèrement, car je crois que vous aurez beaucoup de difficulté à défendre votre point de vue de manière rationnelle : qu’est-ce que ça change que je sois né à Québec ? Quel droit avez-vous de rabattre mes opinions uniquement parce que je suis né et que j’ai grandi dans cette ville ?

Aucun droit. Et pourquoi ?

Parce que vous ne me connaissez pas. Parce que si vous faites ce genre de jugement, vous devez automatiquement accepter votre caractère discriminatoire. Parce que vos paroles me laissent croire que vous êtes le genre d’individu qui s’imagine que le monde est dualiste. Pour vous, dans la vie, il y a les bons et les méchants, les souverainistes et les fédéralistes, les francophones et les anglophones, le blanc et le noir, la ville de Québec et le reste du Québec. Bref, que vous le vouliez ou non, vous êtes comme George W. Bush : « You are with us or you are against us! » (Vous êtes avec nous ou vous êtes contre nous !). D’ailleurs, votre dernière salve sur la ville de Québec le prouve amplement. Vision réductionniste, simpliste et puérile de la vie, elle vous amène à des généralisations grossières qui vous poussent à juger les gens sur la base de préjugés et d’idées préconçues.

Sur ce, même s’il est vrai qu’il y a une méchante gang de crinqués qui habitent la ville de Québec (oui je connais les X), qu’est-ce qui vous fait croire que je suis l’un d’eux pour la simple raison que je suis originaire de Québec ?

Rien.

Or vous, sans même me connaître ou avoir pris le temps de discuter (rappelez-vous de votre « je ne perdrai plus mon temps ici » écrit dès votre première intervention sur ce blogue), vous faites le choix délibéré de croire que je suis l’un de ces individus que vous détestez. C’est complètement gratuit et ça démontre très bien que vous vous refusez à toute discussion constructive.

Avez-vous considéré pour deux ou trois secondes le fait que j’ai habité Montréal pendant près du tiers de ma vie et que mon adresse canadienne officielle s’y trouve encore ? Avez-vous considéré que j’y ai étudié, que certains de mes meilleurs amis d’aujourd’hui ont des racines italienne, salvadorienne, française ou belge à cause de Montréal ? Que j’ai vécu dans Côte-Des-Neiges pendant plus de sept ans et que je sais ce que c’est d’être le seul blanc dans un wagon de métro à la station Parc ? Que j’en ai passé des heures à fouiner dans les magasins de CD usagés de la rue Mont-Royal pendant ses ventes trottoir en plein été ? Que je sais aussi ce que c’est de ne pas pouvoir se faire servir en français à l’ouest de Crescent ?

Non. Pour vous, moi je viens de Québec, donc je suis un connard de la pire espèce. Parce que tout le monde sait très bien qu’on ne retrouve que ça à Québec : des connards de la pire espèce. N’est-ce pas ? (sic)

Et en plus, vous avez l’audace de remettre ma fierté québécoise en question et de croire que je vends mon âme à la langue anglaise ?! Vous osez dire que je suis un adepte de l’à-plat-ventrisme et que je suis colonisé au point de ne plus m’en rendre compte ?! Non mais quel culot le mec ! Tout ça sans même avoir la seule idée de la raison pour laquelle je me trouve où je suis présentement. Eh bien laissez-moi vous instruire à cet effet.

Voyez-vous, il existe une certaine catégorie de la population québécoise qui croit que l’avancement culturel et la reconnaissance de notre peuple passent par l’ouverture sur le monde plutôt que sur l’art de se recroqueviller sur notre passé de peuple conquis. Il existe des Québécois (la majorité d’ailleurs) qui croit au progrès, à l’avenir, à la réussite sociale et économique de notre nation au niveau international. Il existe une majorité de Québécois qui croit que nos connaissances à la fine pointe de la technologie doivent être transmises à l’étranger et que les connaissances acquises à l’étranger doivent également nous être transmises par pure réciprocité et pour l’avancement de notre espèce.

Vous n’aimerez peut-être pas la conclusion de cette salve, mais je suis aux États-Unis à cause de ces Québécois qui ont très bien compris ça. En raison de tous ces Québécois qui ont suffisamment de vision pour se rendre compte de l’importance du transfert de connaissances entre peuples, qu’ils soient anglophones ou autre. Grâce au raisonnement de ces Québécois, j’habite aux États-Unis parce que je suis titulaire d’une bourse gouvernementale du Fonds de Recherche sur la nature et les technologies du Québec, payée par NOS taxes et impôts.

Tout ça, je le fais dans le but d’acquérir des connaissances à la fine pointe de la technologie actuelle dans l’une des universités les plus prestigieuses de la planète (Yale), où des tonnes d’individus de partout dans le monde se rencontrent pour brasser des idées, pour faire avancer les choses. Je suis ici parce qu’il y a des Québécois qui croient VRAIMENT en la diversité culturelle, celle de l’ouverture sur le monde et sur la destruction des barrières de préjugés. Pas la supposée diversité culturelle dont vous vous faites le porte-étendard et qui exclut certains peuples de ce monde. Mon cher Belz, j’habite aux États-Unis dans le but éventuel de pouvoir faire bénéficier NOTRE société québécoise de toutes ces connaissances. Ironique, non ?

Mais non ! À votre avis, moi je suis ici parce que j’ai vendu mon âme aux Anglais et parce que j’ai décidé de « m'inféoder à une manière particulière de penser qui rétrécit les possibles et [qui] détruit la diversité culturelle mondiale » ! Vos propres mots (qui définissent bien l’art de savoir parler à travers son chapeau).

M’inféoder à une manière de penser qui rétrécit les possibles ?!

Belz, pourquoi pensez-vous que j’écris ce blogue ?! En plus d’être extrêmement fier et attaché à ma langue maternelle (que je tiens à conserver à tout prix en y écrivant quelques mots régulièrement), j’aime bien faire ressortir les points positifs et négatifs de notre nation québécoise en les opposant à ce qui se fait chez nos voisins du sud. Car c’est justement là où le bât blesse dans votre position, et je ne saurais le décrire mieux que dans les mots de Sapin :

« (...) vos idées de diversité culturelle et de respect des cultures (...) ne valent guère plus qu'un petit pois sec puisqu'elles reposent sur la prémisse selon laquelle la pleine réalisation de cette diversité et de ce respect est conditionnelle à un rejet systématique et sans appel de la culture anglo-saxonne et de ceux s'en réclamant. Pourtant, être ouvert à la diversité, c'est être ouvert à toutes les cultures, sans exception. Et être ouvert à la diversité, c'est aussi être ouvert à la diversité des points de vue. Or sur ce point, vous semblez éprouver quelques difficultés. »

Décidément mon cher Belz, vous n’en avez aucune idée, mais vous avez trouvé la meilleure manière de vous aliéner des gens qui pensent comme vous sur bien des points : les attaquer gratuitement et les provoquer. Non seulement vous insultez mon intelligence en jugeant faussement mes intentions et les motifs de mon existence, mais vous avez en plus le culot de remettre en question ma fierté d’être Québécois ! Vous n’avez aucune idée de l’ouverture sur le monde que l’on peut avoir lorsqu’on se retrouve seul à l’étranger. Vous n’avez non plus aucune idée du fait qu’à ma manière bien personnelle, je tente de transmettre une partie de ma culture à mes semblables.

Car si je « m’inféodais » à la culture anglophone et que j’étais aussi colonisé que vous le dites, comment se fait-il qu’un laboratoire de chimie de l’Université Yale écoute si régulièrement la musique des Cowboys Fringants, de Marc Déry, de Dumas, de Malajube, de Richard Desjardins ou de Mickey 3D ? Comment se fait-il qu’une Chinoise, un Sri Lankais, un Ukrainien et quatre Américains me demandent quotidiennement de leur apprendre quelques mots de français (à un point tel que le tableau du labo en est désormais rempli) ? Et comment se fait-il que mon bureau, au milieu de ce monde si anglophone dans cette contrée si anglophone, arbore néanmoins un drapeau Québécois visible de partout aux alentours ?

Parce que j’aime ce drapeau et j’aime ce qu’il représente. Vous aurez beau dire le contraire, mais moi je suis prêt à dire que je célèbre minimalement ma culture et que je contribue à assurer la diversité des cultures humaines. Non ? D’ailleurs, ce n’est pas vous qui avez fait l'apologie de ça dans votre billet hargneux contre Québec : « (...) en se célébrant soi-même, on contribue à assurer la diversité des cultures humaines. » ? Oui, c'est bien vous.

Tout ça, ça ne vaut peut-être rien pour vous, mais un jour si vous marchez au milieu de Potsdamer Platz à Berlin, vous regarderez bien attentivement les drapeaux qui y flottent. Ce jour-là, quand vous ressentirez la même fierté que moi à la vue de ce drapeau juché à côté de la porte de Brandeboug, au beau milieu de cette place si symbolique et chargée d’histoire lourde et sinistre au niveau de la discrimination des peuples, vous vous raviserez peut-être sur votre vision actuelle du Québec et des anglophones. Ce jour là, vous reviendrez ici et vous me ferez d’autres leçons sur mon ouverture sur le monde et sur ma fierté d’être Québécois. D’ici là, au lieu de juger les gens à qui mieux mieux parce que vous pensez qu’ils sont comme ci ou comme ça, apprenez donc à les connaître.

Oh, et dites-moi donc en terminant, avez-vous lu le sous-titre de ce blogue ? Je dis ça comme ça, mais ça vaut parfois la peine de se le rappeler :

« Rien n'est plus dangereux qu'une idée quand on n'a qu'une idée. » -Johann Wolfgang von Goethe

2008-07-22

Sentiment de colonisé, quand tu nous tiens...


Au niveau des idées, je répugne au plus haut point le monde virtuel dans lequel nous vivons. Pourquoi ? Parce qu’avec Internet, il est tellement facile de se réfugier derrière des opinions sans nécessairement les assumer réellement. Écrire un commentaire anonyme sur le web, c’est littéralement comme jouer à la grande gueule qui critique le système sans bouger son gros derrière pour aller voter aux élections. Mais bon... Trêve de montée de lait, je me permettrai quand même de citer ce commentaire anonyme paru récemment sur mon blogue, qui traite en termes peu élogieux de l’identité québécoise contemporaine :

« De plus, depuis quand le peuple québécois est-il souverain ? Il est conquis et n'a jamais accepté sa défaite. Il rampe dans les bas-fonds du ressentiment et de la vengeance et souille de sa bave toute grandeur d'âme. »

Autant le cliché de « l’anglo-méchant-loup » est-il encore si ancré au Québec, autant le préjugé du Québécois vengeur l’est également. Sans dire que j'entérine complètement le propos susmentionné - que je trouve légèrement exagéré -, je suis néanmoins d'accord avec le fait que les Québécois ont bien de la difficulté à accepter le succès (tant le leur que celui de leur prochain). Plus souvent qu’autrement, ils tenteront même de rabattre avec un mesquin plaisir tous ceux qui auront réussi internationalement, adoptant ainsi une attitude d’un ridicule risible qui affecte grandement la reconnaissance de notre peuple à l’étranger.

Sous quel prétexte fait-on cela au Québec ? En grande partie en raison de ce sentiment de colonisé sur la défensive qui se réfugie sur sa personne dans le but de préserver sa culture (ironique, n'est-ce pas ?). Au Québec, on a trouvé un moyen plutôt bizarre de se manifester : au lieu de s’ouvrir sur le monde, on se rabat sur soi-même et on se complait à croire que le retour au folklorisme du passé est la meilleure chose qui pourrait arriver à notre peuple francophone (voir les textes de Belz cités ci-bas).

Bref, le Québécois qui chiale contre tout ce qui est anglophone, c’est un peu comme le Canadien Anglais qui tente de justifier son identité culturelle par rapport à celle d’un Américain : il est sur la défensive, car il a peur de se rendre compte qu’il n’est pas si différent que ça finalement... En effet, s’il était si certain de son identité culturelle, il n’aurait pas peur de chanter dans n’importe quelle langue et de projeter son image à travers le monde, car il serait convaincu de ses racines, de sa reconnaissance internationale et de sa langue. Mais pour ça, il n’est pas totalement faux que le Québécois devrait être officiellement reconnu comme maître chez lui.

Or malgré tout, au Québec, on aime tellement rabattre les réussites culturelles et financières de nos confrères que ça frise littéralement « l’auto-xénophobie ». Un anglophone prononcerait de telles paroles négatives à notre endroit qu’il se ferait crucifier sur la place publique. Mais lorsqu’un Québécois défèque sur la tête d’un autre Québécois comme si de rien n’était, tout passe mystérieusement comme dans du beurre (ce fut d’ailleurs le secret de plusieurs premiers ministres canadiens qui ont adopté la ligne dure envers le Québec). À cet effet, je fais ressortir deux billets de Belz avec lesquels je suis en TOTAL DÉSACCORD au niveau culturel :

Doit-on se séparer de Quebec City ?

et surtout :

Un groupe artificiel pour une fête artificielle

Comparativement à la St-Jean, la fête du Canada au Québec est bel et bien un happening complètement faux, rien à redire là-dessus. Tout individu ayant participé aux deux fêtes nationales par le passé le comprend bien assez vite. Mais pourquoi critiquer le succès d’artistes québécois qui réussissent mondialement uniquement parce qu’ils chantent en anglais ?

Sentiment de colonisé, sans plus. Or le problème avec ce sentiment de colonisé, c’est qu’il n’acceptera jamais que la culture québécoise puisse passer par autre chose que par le traditionalisme folklorique, et ainsi donc par la l’opposition infinie des langues française et anglaise.

La preuve ? Pourquoi critiquer ces artistes musicaux plutôt qu’une réussite comme celle du Cirque du Soleil, par exemple ? Voilà un autre bon exemple québécois de réussite mondiale culturelle. La différence ? Cette réussite mondiale qui nous flatte dans le bon sens du poil (à l’opposé des Simple Plan et compagnie) n’a rien à voir avec la langue. Le Cirque du Soleil, ce n’est pourtant pas de ce que l’on considère comme la culture « classique » du Québec n'est-ce pas ? À ce que je sache, mes arrières grands-parents ne sautaient pas d’un trapèze à l’autre en se levant le matin et ne se crachaient pas du feu entre frère et sœur avant de passer à table le soir venu...

À cet effet, que les partisans du « français à tout prix » ne me sortent pas l’excuse que le Cirque du Soleil est une création originale alors que Simple Plan et Pascale Picard ne font que répéter ce qui se fait du côté américain. Avec des arguments comme ceux-ci, vous ne convaincrez guère que vous-même.

Pourquoi ?

Pace qu’originalité ou pas, tout le monde sait très bien que ce qui vous fait réellement capoter et sortir de vos gonds, ce ne sont pas les produits culturels en soi, mais bien la langue privilégiée pour les diffuser. Ce qui vous agace au plus profond, ce n’est pas que ces artistes soient originaux ou qu'ils aient copié ce qu'un autre peuple fait, mais bien qu’ils aient réussi dans la langue de ceux que vous haïrez jusqu'à ce que vous soyez dans votre tombe et qui vous empêchent TELLEMENT (sic) d'être ce que vous seriez sans eux : les « maudits Anglais », les envahisseurs, les laveurs de cerveaux, les meurtriers au sang froid.

À cet effet, je termine avec un commentaire déniché sur le blogue d’AngryFrenchGuy et discutant de la venue de McCartney au 400e anniversaire de la ville de Québec : “People of Quebec City, unlike you [people who criticize the alleged anglophone assimilation of Quebec], are confident in their culture and language, and at the same time are able to appreciate those artists who eclipse the concerns of individual nations and address all people.”

Vous aurez beau dire ce que vous voudrez, mais de la musique comme celle des Beatles, c’est universel et ça n’a rien à voir avec la langue dans laquelle c'est chanté.

Spéculation oblige, vous voulez savoir l’ironie dans tout ça ?

Si Céline Dion, Simple Plan, Pascale Picard et Paul McCartney étaient des artistes qui chantaient en espagnol, en russe ou en créol, Belz n’aurait jamais écrit ce genre de billet et les extrémistes à la Curzi et Falardeau ne seraient jamais montés sur leurs grands chevaux comme ils l’ont fait la semaine dernière à propos de ce concert.

Sentiment de colonisé, quand tu nous tiens...

2008-07-19

La crise d’identité : une question d’orchestre symphonique et d’unité nationale


Une fois l’an, l’orchestre symphonique de New Haven (NHSO) organise une activité que ceux de Québec et de Montréal auraient intérêt à imiter. À 18h00 samedi dernier, tout le monde était encouragé à se déplacer sur le Green du centre-ville (un parc situé au centre du quartier principal) pour regarder et écouter l’orchestre symphonique de la ville en plein air. Non seulement cette activité permet-elle de faire découvrir un événement culturel habituellement considéré élitiste (une soirée symphonique), mais elle rapproche les gens de plusieurs classes sociales dans un endroit peu propice à ce genre de rencontres. Tout ça dans le but de leur faire découvrir les beautés de la musique classique.

Idée encore plus farfelue et géniale : on fait participer les individus qui le veulent bien. À la fin du concert, on encourage les musiciens en herbe à sortir leurs instruments de musique pour jouer trois pièces classiques du répertoire américain avec accompagnement orchestral : The Star Spangled Banner, America the Beautiful et Pomp and Circumstance. Résultat ? Un melting pot total d’unité musicale que les Américains aiment bien analyser patriotiquement :

"This melting pot of cultures, which creates an extraordinary and unique dynamism of people from all over the world, makes up America. But what is even more extraordinary is these divergent cultures also create a unity - a vision of a future that connects them in a way that is not possible within their 'old' countries. Their optimistic striving for a better life and a better world leaves no room for the cynicism of old, only an idealism of what can be. The composers represented in this program capture this spirit of America." (William Boughton, directeur musical du NHSO)

Nonobstant l’exagération patriotique d’un propos qui frise l’arrogance, on salue néanmoins l’initiative. En effet, les Américains qui se sont permis de jouer de leur instrument de musique samedi dernier ne débarquaient évidemment pas tous du bateau et/ou ne provenaient pas tous d’un ‘vieux’ pays totalitaire en quête d’idéaux ! Connaissant désormais un peu plus la ville, la plupart étaient probablement justement blancs ou noirs, vieux ou jeunes, liés de près ou de loin à la communauté de Yale et Américains depuis plusieurs générations.

Or, malgré les propos teintés d’exagération de Boughton, cette idée d’Unité Nationale (avec majuscules) demeure malgré tout très ancrée chez les Américains, et elle s’avère habituellement bien réelle. Ici, qu'on vienne de l’Argentine, des Philippines ou de la Chine, on est avant tout Américain. D’ailleurs, on immigre bien souvent ici dans ce but précis : devenir Américain.

On ne peut pas en dire autant du Canada...

Vous savez qu’aux États-Unis il est mal vu de demander les origines ethniques de quelqu’un ? Pourquoi ? Parce que lorsque vous posez cette question, on suppose automatiquement que vous appliquez une hiérarchie dans ce que vous considérez être « Américain ». Ici, à quelques exceptions près, les immigrants ne diront jamais qu’ils sont Indiens, Sri Lankais, Chinois, Thaïlandais ou Mexicains. Ils se caractériseront comme Américains et ils le diront fièrement, haut et fort.

Encore une fois, on ne peut pas en dire autant du Canada...

Au Canada, on aime bien dire qu’on est X, Y ou Z avant de se caractériser comme Canadien et/ou Québécois. Ironiquement, on immigre bien souvent au pays avec l’idée qu’il s’agit de la « petite Amérique » (Little America). Ce qui est comique dans tout ça, c’est que ce manque d’unité nationale vaut aussi pour les Québécois de souche (non je n’arrêterai pas d’utiliser cette expression !), car au Québec, qu’on soit fédéraliste ou souverainiste, on se considérera bien souvent comme Québécois avant de se considérer Canadien. C’est une différente perception des choses qui cache malheureusement un manque flagrant de patriotisme et d’unité nationale canadienne. Défaut ou qualité ? Ça dépend du point de vue :

« (...) Canadians don't want to be the "melting pot" that the US boasts – where you're an American first and a Nigerian or a Burmese or a Latvian second. They believe – or the "multiculturalists" believe – that Canadians should be encouraged to keep their own languages and traditions and religions intact. You can be a Syrian-Canadian Muslim and speak your own language and read your own Arabic language newspaper or watch Arabic movies but still enjoy and support the freedoms of Canada under the maple leaf flag.

I like this idea – or rather, I think I do. If it works. It's too soon to say and no one can admit it won't work because, if they do, someone's going to start figuring out which ethnic, religious or national group is going to be among the first invitees to climb aboard the wooden boat back to their country of origin. And that would be the end of Canada. In some ways, this allows Canadians to define themselves in the negative. They are not Americans. Canada is not aggressive. It pours money into NGOs and refugee camps and education for newly arrived immigrants. »
(Robert Fisk: A lesson from across the Atlantic, The Independent, 12 juillet 2008)

Constat ? Au Canada, on a l’unité nationale alors qu’aux États-Unis, ils ont l’Unité Nationale. Résultat ? Au Canada et au Québec, on doit se préoccuper « d’accomodements raisonnables » alors qu’aux États-Unis, tout le monde comprend qu’on devient Américain avant tout.

Bien honnêtement, je ne sais plus trop quoi en penser...

2008-07-16

De l'acharnement pur et simple

Là je m’excuse d'avance, mais des articles dans ce genre, ça me fait péter les plombs.

Plus que ça : des articles dans ce genre, ça me donne quasiment le goût de lâcher une phrase dans le style de « maudite gang syndicale de gogauche politique du PQ de mes deux » ! J’ai longtemps eu du respect pour les gens de cette formation politique, mais depuis le départ des Bouchard et Landry il y a quelques années, ils dégringolent la pente de la xénophobie sociale à toute allure.

Avec des affirmations dans le genre, on croirait que les Curzi et Falardeau de ce monde ne seront réellement satisfaits que lorsque le Québec sera souverain, 100 % francophone, légalement xénophobe, officiellement raciste et dans lequel on aura éliminé toute trace historique faisant référence aux Anglais (sauf pour dire qu'ils sont des gros méchants) ! Et encore. Rendu là, les principaux intéressés trouveront certainement une autre raison de chialer contre eux...

Hé ho ! McCartney à Québec, c’est le spectacle d’un artiste qui a bien voulu accepter l’invitation de l’organisation du 400e. C’est tout ! Lâchez vos prétentions souverainistes et appréciez le show. Et petite nouvelle comme ça les amis : la ville de Québec est bourrée d’histoire anglophone ! C’est quand même là que les Français ont commencé à tout perdre contre les Anglais en en 1759. L'auriez-vous oublié ?

Y’a toujours bien des limites à ne voir qu’un côté de la médaille et à faire du révisionnisme historique. C'est de l'acharnement pur et simple votre affaire.

C'est pas mêlant, des articles dans le genre, ça me donne quasiment le goût de recommencer à écouter Jeff Fillion le matin. Ce n’est pas peu dire.

2008-07-13

Le village gaulois du "streaming"


Lors de réunions familiales, on me demande souvent pourquoi je ne regarde presque jamais de télévision québécoise. « Pourquoi ne regardes-tu que des séries anglophones ? Tu sais, y’a des bonnes choses faites au Québec aussi ! » Nonobstant le fait que la qualité des séries anglophones est souvent de loin supérieure aux décors en carton que l’on voit à Radio-Canada et à TVA à chaque année, il y a surtout le fait que je ne possède pas de télévision. Et au Québec, sans poste de télévision, on ne va pas très loin côté télé...

Lorsque j’ai entrepris de poursuivre mes études supérieures à Montréal en l’an 2000, non seulement je n’avais pas les moyens de me payer de télévision, mais j’avais encore moins les moyens de me payer le câble à chaque mois ! À partir de ce moment, pour moi, la télévision est devenue une affaire d’Internet et de DVD.

J’ai donc passé les huit dernières années de ma vie à me divertir avec des coffrets de séries télé et/ou en regardant mes émissions favorites en transit via internet (c’est-à-dire en faisant du streaming). La première de ces deux activités nécessitait inévitablement l’achat périodique de quelques séries en format DVD, chose qui m’a permis d’accumuler une bonne collection avec les années. Or, puisque les séries américaines se vendent presque toujours *littéralement* deux fois moins chères que les séries québécoises, ce n’est pas difficile de faire pencher la balance de ce côté.

La seconde activité (le streaming), fortement illégale il y a plusieurs années, est désormais extrêmement populaire partout sur la planète, et les médias de masse s’en rendent de plus en plus compte (j’ai déjà écrit un topo là-dessus d’ailleurs). Tranquillement, les revenus publicitaires commencent à transiter vers l’écoute d’émissions en direct sur le net et les grands réseaux de télévision l’ont compris depuis longtemps. À cet effet, Hugo Dumas nous écrit un très bon papier dans La Presse d’hier. Les chiffres sont franchement surprenants.

Par contre, devinez quoi ? Le village gaulois québécois résiste encore à l’envahisseur. Oh ! Certainement pas ses internautes, mais assurément ses organismes syndicaux... Vous la voyez la surprise dans mon visage ? Non, bien sûr que vous ne la voyez pas puisqu'il n'y en a pas.

Extrait de Dumas :

« (...) contrairement à ABC, les réseaux d’ici comme TVA et Radio-Canada n’offrent pas encore leurs séries dramatiques et téléromans en «streaming», car les négociations avec les organismes de l’audiovisuel – dont l’Union des artistes (UdA) et l’Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ) – n’ont pas encore été bouclées.


J’ai très hâte que toutes ces tracasseries syndicales se règlent et que le Québec cesse de traîner la patte par rapport au reste de la planète. Imaginez avoir la possibilité de revoir, gratuitement et à n’importe quel moment, un épisode de Nos étés ou de C.A. avec deux fois moins de publicité. Et plus besoin de guetter la sortie des coffrets DVD pour assouvir notre boulimie télévisuelle. Génial, non? Bien sûr. Mais faisable? On est loin de la soupe aux lièvres, comme dirait l’autre. »


Quand le Québec télévisuel sera enfin rentré dans le 21e siècle technologique, je retournerai volontiers aux bonnes séries télé de « che-nous ! ». Or pour l’instant, tant géographiquement que télévisuellement, pour moi « che-nous ! », c’est les États-Unis.

Ouch ! Elle était psychologiquement difficile à dire celle-là...

2008-07-12

Buffalo buffalo Buffalo buffalo buffalo buffalo Buffalo buffalo


On a tous déjà entendu quelque chose du genre et ceux qui ont bien assimilé les leçons propagandistes du curriculum de l’éducation québécoise des quelques cent dernières années auront tôt fait de le confirmer : l’anglais est une langue combien inférieure au français à tous les niveaux. (sic) De ce fait, idée préconçue à l’appui, on saura immédiatement qu’il est plus facile pour un francophone d’apprendre l’anglais que pour un anglophone d’apprendre le français. Voyons donc, c’est évident ! (sic) Certains s’aventureront même dans l’élitisme linguistique, jugeant que le français est l’une des langues les plus difficiles à apprendre sur notre planète (non mais !).

Ceux qui ont un intérêt minimal pour la linguistique et qui sont persuadés de la simplicité de la langue anglaise méritent de se gratter le coco en lisant ça et ça. Et pour ceux qui sont encore persuadés de la difficulté du français sur les autres langues de ce monde, quelques précisions sont de mise : , , et .

Lorsqu’on laisse tomber ses barrières de préjugés et qu’on remet en question la propagande élitiste de notre éducation francophone, on en apprend bien des choses sur notre langue, notamment qu’elle demeure l’une des langues de ce monde les plus simples à apprendre pour un Anglophone (n’en déplaise à bien des Québécois...).

2008-07-09

Brutaliser sa marque de commerce

J’ai toujours trouvé relativement pathétique le placement de produit et les stratégies de marketing qui tentent à tout prix de nous vendre un produit commercial quelconque. Les compagnies qui se lancent dans ce genre d’études déboursent littéralement des millions de dollars pour attirer l’oeil du consommateur et pour s’assurer qu’il est psychologiquement satisfait des moindres petits détails du produit qu’on veut lui vendre.

Ceci étant dit, dans notre joli monde contemporain, on n’hésitera aucunement à changer le nom de son produit pour accommoder les caprices de différents marchés, peu importe la reconnaissance mondiale de sa marque. Voici deux exemples édifiants de produits similaires (ou distincts ?) que l’on retrouve sur les étalages des supermarchés canadiens et américains :

1) Je ne sais pas pour vous, mais moi j’ai grandi en mangeant des petits pois ‘Le Sieur’, et non pas ‘Le Sueur’ ! Comique :


Remarquez que la compagnie est américaine et qu’elle a débuté ses activités au siècle dernier dans la petite ville de Le Sueur, Minnesota. Donc, les Américains ont un petit peu plus raison que nous en mangeant du ‘Le Sueur’...

2) Exemple inverse : partout dans le monde, on mange du yogourt ‘Danone’, sauf aux États-Unis, où on se bourre la face de ‘Dannon’ ! Faut croire que l'original était trop difficile à prononcer (même si, curieusement, Häagen-Dazs est aussi une compagnie purement américaine) :

Je garde l'oeil ouvert pour vous en trouver d'autres...

2008-07-05

Le jour des pétards


Vous le saviez probablement déjà, mais hier c’était la fête nationale des États-Unis d'Amérique. Pour le pays, cette journée commémore la signature officielle de la déclaration d’indépendance du royaume de la Grande-Bretagne, le 4 juillet 1776. En fait, les historiens ne savent pas officiellement si tout ça s’est passé exactement à cette date puisqu’ils ont perdu le document officiel. Mais bon, c’est un détail (on va dire).

À cet effet, même si le monde entier est au courant que le 4 juillet commémore la journée d’indépendance des Américains, eux par contre n’ont aucune idée que mardi dernier c’était le jour du Canada. Si près soient-ils de nous géographiquement, commercialement et philosophiquement, il y a très exactement trois personnes aux États-Unis qui savent que le 1er juillet est le jour du Canada... et ce sont tous des Canadiens ! Remarquez qu’on ne blâme pas les Américains de ne pas savoir ça, car contrairement à la plupart des pays de ce monde, le Canada ne fête pas vraiment son indépendance le 1er juillet de chaque année, mais bien la création d’une fédération d’états britanniques qui, jusqu'à ce jour, n’est pas encore totalement indépendante. Mais ça aussi c’est un détail (on va dire).

Trêve de plaisanteries et de Champlain qui mange de la poutine à notre ambassade de Washington, je me permets de souligner l'un des nombreux faits anecdotiques de la fête nationale américaine : les feux d’artifice du 4 juillet. Non seulement les Étatsuniens sont-ils doublement patriotiques en cette journée spéciale de l’année, mais ils sont littéralement *obsédés* par les feux d’artifice. Partout les feux d’artifice ! Des plus petits trous aux grandes mégapoles, toutes les villes organisent des feux d’artifice pour le 4 juillet et tout le monde s’amuse à faire détoner des pétards dans sa cour arrière, chose qu’on ne voit pratiquement jamais au Québec.

Vous pensez que j’exagère ? À l’approche de la fête nationale, l’obsession est tellement forte ici que l’on retrouve des feux d’artifice artisanaux fortement règlementés dans toutes les boutiques du pays, de l’épicerie à la quincaillerie. On pousse même l’extrême jusqu’à installer des kiosques temporaires de « TNT » en plein milieu des stationnements de centres d’achat ! Photo à l’appui :


Décidément, les différences culturelles ne cesseront jamais de me surprendre...

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