2008-02-02

Pour en revenir à l'histoire des pneus

Je commence à en avoir marre de la démonisation sociale que l’on porte aux gens qui font le choix de ne pas installer de pneus d’hiver sur leur voiture en cette saison des neiges. Comme au temps des sorcières, il semble que l’on cherche à tout prix à mettre le blâme sur quelqu’un pour la cause de tous nos malheurs routiers, et il s’avère que les gens qui roulent en pneus quatre saisons sont désormais les dindons favoris de nos transports hivernaux. Avant d’aller plus loin, qu’on ne me fasse pas de procès d’intention : je ne suis aucunement contre les pneus d’hiver, je suis tout à fait conscient de leur importance, de la sécurité qu’ils procurent et j’en possède d’ailleurs personnellement quatre. En revanche, l’opinion publique y va gaiement, elle roule à 130 km/h sur l’autoroute (comme le fait la ministre) et elle dépasse tout le monde sur la voie d’accélération en plein tempête, car l’opinion publique québécoise a trouvé la solution miracle à tous nos problèmes hivernaux : les pneus d’hiver ! On va même obliger tout le monde à en en installer à chaque année à partir de 2008. Quelle foutaise...

Ce type de raisonnement me fait penser à la bonne conscience qu’on se donne en recyclant notre petit carton de lait hebdomadaire à titre de solution miracle aux problèmes environnementaux de la planète. On possède trois voitures dans l’entrée et on change de tondeuse à tous les deux ans pour simple le plaisir de consommer ? Pas grave, on recycle notre papier ! On mange un gros gâteau au chocolat à tous les jours ? Pas grave, on boit du lait écrémé ! On conduit à toute allure sur l’autoroute en hiver ? Pas grave, on a des pneus d’hiver ! Un vrai raisonnement professionnel de fourrage de doigt dans l’oeil jusqu’au coude. Comme le fait l’autruche avec sa tête dans le sable, nous vivons dans une société qui refuse de voir la vérité en pleine face et qui s’en faire accroire à profusion.

Le problème de la pollution, c’est la surconsommation et la croissance économique. Le problème de votre gros bedon, c’est l’absence d’exercice et la mauvaise alimentation. Le problème des accidents de la route à longueur d’année, c’est la vitesse et/ou l’alcool. Un point c’est tout. Quand c’est écrit 100 km/h en grosses lettres sur les pancartes blanches de l’autoroute, ce n’est pas une suggestion ou un défi de dépassement personnel. Ce n’est pas non plus un message subliminal qui veut dire "la police ne m’arrêtera pas tant que je ne dépasserai pas 119 km/h". Pneus d’hiver ou pneus quatre saisons, ralentir est une question de sécurité, une question de ne pas se tuer ou de tuer les autres. D’ailleurs, vous êtes au courant que vous n’êtes pas obligés d’aller aussi vite que ce qui est écrit sur la petite pancarte blanche, n’est-ce pas ? C’est d’ailleurs pour ça qu’il y a un gros 60 km/h d’écrit sous le gros 100 km/h. Ça veut dire que l’intervalle, c’est entre 60 et 100 km/h, pas entre 110 et plus de 140 km/h ! Or, il semble que l’essentiel, c’est d’aller toujours plus vite, de faire la distance Québec-Montréal en 2 heures au lieu de la faire en 2h30. Il ne faudrait surtout pas perdre la grosse demi-heure supplémentaire passée à s’écraser devant la télé une fois arrivé à la maison ! C’est tellement bon Loft Story et Virginie...

Ne nous méprenons pas, en plein mois de janvier, c’est certain qu’il est plus sécuritaire de rouler à 100 km/h avec des pneus d’hiver qu’avec des pneus quatre saisons. En revanche, prenez-moi pour un con si vous le désirez, mais dans les mêmes conditions et peu importe la saison, j’aime encore mieux rouler à 100 km/h avec des pneus quatre saisons qu’à 140 km/h avec des pneus d’hiver !

Sur ce, en hiver, louer une voiture avec des pneus d’hiver, ça devrait effectivement être un choix. Un vrai choix là, pas un "ça-va-vous-coûter-30-piastres-de-plus-par-jour-pour-avoir-ça-si-je-trouve-le-char-dans-mon-inventaire " (expérience vécue...). En revanche, cette fameuse loi forçant tous les automobilistes québécois à installer des pneus d’hiver entre le 15 novembre et le 15 avril à chaque année, c’est un autre bel exemple d’autruche qui se fourre la tête dans le sable. Pensez-vous sincèrement que les accidents vont diminuer parce que tout le monde a des pneus d’hiver ? Sincèrement là, réfléchissez. Selon le ministère des transports, 84 % des automobilistes installent déjà des pneus d’hiver à chaque année, VOLONTAIREMENT. Êtes-vous réellement convaincus que c’est l’autre 16 % qui cause tous les accidents de la route en hiver ? Pas moi.

Pensez-vous également que, rendu au 15 avril de chaque année, tous les automobilistes vont retourner au garage pour faire installer des pneus d’été ? Allons donc. Nous serons mis face au problème inverse (qui, malheureusement, existe déjà beaucoup présentement) : des automobilistes qui gardent leurs pneus d’hiver à longueur d’année et qui se retrouvent avec des pneus d’hiver sur la fesse l’hiver suivant. Ça c’est dangereux, pas mal plus que de garder ses pneus quatre saisons à longueur d’année !

À cet effet, pour ceux qui ne seraient pas encore au courant, avoir des pneus d’hiver en été n’est pas mieux que d’avoir des pneus quatre saisons en hiver. En été, les pneus d’hiver se dégradent beaucoup plus rapidement, ils collent à la chaussée, ils freinent moins bien à haute température et ils font consommer plus de carburant (beaucoup plus de carburant !). Mais ça, la consommation, ça ne semble pas déranger la populace trop trop... On veut imposer le port des pneus d’hiver ? La logique et la sécurité voudraient que l’on impose également le port des pneus quatre saisons en été. Or, la logique ne semble pas être la grande priorité de l’opinion publique par les temps qui courent.

GBS. Gros. Bon. Sens.

Juste pour le fun, qui d’entre vous vérifiez régulièrement la pression dans vos pneus ? C’est ce que je pensais. Vous êtes au courant que vous devez faire ça, oui ? Vous êtes aussi au courant que le temps et la température extérieure affectent la pression de vos pneus, n’est-ce pas ? À titre d’exemple, entre la fin des chaleurs d’automne et les températures hivernales qui descendent sous le point de congélation, mes pneus passent facilement d’une pression de 32 livres par pouce carré (leur valeur optimale) à 20-25 livres par pouce carré. Alors, avec les variations de température que nous avons en hiver depuis quelques années, ça ne vous est jamais passé par l’esprit qu’un pneu d’hiver à mauvaise pression est moins efficace qu’un pneu quatre saisons à pression optimale ? Ça non plus il semble bien que ça ne vous préoccupe pas trop. C’est bien trop facile de blâmer les pneus quatre saisons en bloc pour tous les malheurs du monde hivernal québécois !

C’est triste, mais l’opinion publique perd de vue l’essentiel, la cause réelle de nos problèmes. Installer des pneus d’hiver ? Absolument, c’est logique et sécuritaire. Par contre, arrêtons de se faire accroire que les meurtriers de la route se cachent parmi les gens qui gardent leurs pneus quatre saisons en hiver. Asimov disait : "Si la connaissance peut créer des problèmes, ce n'est pas par l'ignorance que nous pouvons les résoudre". Or, avec des lois comme celle-ci qui flattent l’opinion publique dans le bon sens du poil, il semble bien que l’on tente de faire justement ça, très exactement.

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